Nul besoin de se retourner. Il savait que l’Agent Red était en train de faire un large sourire dans son dos. Rira bien qui rira le dernier. La prochaine fois, il se battra un peu plus sérieusement. Il imagine déjà la face déconfite d’Aliya lorsqu’il en sortira vainqueur avec 100 mètres d’avance, et lui qui se pavanera comme un fier paon, le sourire ou coin…

Oubliez cette dernière image tout compte fait.

« C'est quand tu veux pour la revanche ! On fait quoi maintenant ? »

La réponse était plutôt évidente. En tant que Souverain, il ne pouvait s’accorder que peu de temps pour de tels loisirs. L’heure de retourner aux affaires du Royaume. Comme son éducation le lui avait enseigné, il proposa à son « invitée » de prendre appuie sur sa main afin de gravir les quelques marches qui amenaient à l’intérieur du carrosse. Il embarqua à son tour, choisissant une place en face de celle de la rouquine. La portière se referma toute seule, puis le véhicule prit rapidement son envol.

Bras croisés, yeux clos. La pose favorite de notre grand blond. Son esprit était déjà tourné vers le prochain cas qu’il se devait de régler au plus vite. Certains de ses sujets vivant dans les parties rurales auraient eu des problèmes avec de violentes attaques menées par des agresseurs inconnus. Oberon pensait à envoyer quelques soldats afin d’éclaircir la situation, mais il se refusait à faire du mal à des êtres vivants. Surtout s’il ne les avait pas encore clairement identifiés.

Soudain, Oberon sentit une présence s’approcher dangereusement. Puis une autre. Ce n’était pas des Fées. Mais il n’eut pas le temps de faire quoique ce soit. Quelque chose venait de percuter leur habitacle dans un violent bruit de bois brisé, tandis que le véhicule déviait inévitablement de sa trajectoire. Impossible de savoir si le cocher avait encore la maitrise de son attelage. Il n’avait pas entendu le moindre hurlement, aussi supposa-t-il que ce dernier était en vie. Ou mort sur le coup. Pour ne pas prendre de risque en cas d’éventuelle chute, le blond déploya un large bouclier magique autour du carrosse. Ce qui fut une manœuvre judicieuse, car la voiture s’écrase violemment sur le sol, effectuant de nombreux tonneaux avant de s’immobiliser en soulevant un mélange de poussières et de finis particules rocheuses.

Comme on pouvait s’y attendre, Oberon fit preuve d’un sang-froid exemplaire.  Fermement assit sur son siège, bras tendus de part et d’autre, la sphère bleu azur recouvrant toujours ce qui restait du carrosse. Les deux protagonistes étaient toujours à l’intérieur de l’habitacle, à présent déformé par l’accident. Il se tourna vers l’Agent Red, qui semblait être encore en un seul morceau.

« Une douleur quelque part? Est-ce que tes idées sont encore bien en place dans ton esprit? »

Une façon assez particulière de demander si elle n’était pas blessée ou qu’elle n’avait pas reçu de choc au crâne. Le souverain cessa de déployer sa protection magique et dégagea la toiture du véhicule d’un coup de poing. Il se hisse facilement à l’extérieur et tendit la main à la rousse afin qu’elle puisse faire de même. Oberon s’étira fit craquer les articulations de son coup puis se tourna en direction du ciel. Qui avait bien pu s’attaquer à eux? Ou plutôt quoi?

Red était en un seul morceau. Une partie de lui aurait peut-être aimé voir la jeune fille se briser un peu. Son petit côté sadique. Mais d’un autre côté, il se sentait plutôt soulagé de voir qu’elle n’avait rien. Un otage utile était un otage vivant.
Les yeux toujours levés vers le ciel, son instinct lui fit redescendre sur terre.  Il n’eut pas le temps de cligner les yeux qu’ils étaient déjà encerclés par trois « individus » à l’apparence peu conventionnelle. Même pour Oberon.

« C'est quoi... ça ? »

Très bonne question. C’était des humanoïdes, mais étaient-ils humains? Des fées? Des elfes? Impossible de le confirmer, étant donné que leurs visages étaient masqués par du tissu abimé. On ne pouvait que distinguer deux petits yeux brillants entre deux bandes de vêtements. Le reste de leurs corps était partiellement recouvert du même genre de tissus, laissant apparaître à certaines parties, une peau mauve et craquelée, à la limite de la putréfaction. Il ne pouvait pas vraiment le qualifier de momie, même si la comparaison était inévitable.

La fée sentit la jeune fille se rapprocher de lui, serrant fortement sa main qu’elle n’avait jamais lâché. Elle avait raison d’avoir peur. Oberon ne pouvait pas sentir d’énergie émaner de ces créatures. Comme si elle n’était pas présente, raison pour laquelle il ne les a pas senti arriver.

Soudain, l’un des monstres se rua en direction de nos deux amis, déployant 5 griffes longues d’une dizaine de centimètres sur le bout de ses bras. En plus d’être extrêmement rapide, ses mouvements étaient très précis. Le souverain se rendit compte que ces griffes visaient particulièrement la rouquine.

« Tu ne la toucheras point! »

Oberon réagit à la vitesse de la foudre, écrasant son poing contre le crâne de l’assaillant. Ce dernier s’écrase lourdement contre le sol, créant un mini cratère dans lequel il vint se loger, soulevant un nuage de poussière et de terre par la même occasion. Il était dur de suivre un adversaire qui masquait sa présence. Le souverain ne pouvait compter que sur ses sens primaires, bien qu’il en eût un peu perdu l’habitude.

Cela se confirmait, car il vit un peu trop tard que les deux autres avait profité de la pagaille pour tenter de s’en prendre à la rousse. Il lui fallait réagir, et vite!