Ce qui est bien pratique avec le bâtiment de l'Organisation, c'est qu'on le repère facile. Un vieux château au milieu de la ville racheté par le Loup à la mairie, il y a plusieurs années. Une belle oeuvre d'ailleurs, toute plein de finesse malgré les grosses pierres et dans laquelle on avait découpé des arcs et divers symboles. Y avait pas à dire, ça pétait la classe.
Ce qui est moins pratique, c'est sa tendance à vous faire tourner en rond même pour une porte censée se trouver à trois mètres de vous. C'est à peu près ce qui se passait d'ailleurs avec Blue. Les mêmes couloirs passaient depuis déjà une vingtaine de minutes et sa patience s'épuisait lentement mais sûrement.
Elle n'avait pas avertit Vassilisa de son arrivée, pas le temps d'appeler et de fixer une date et une heure. Il lui fallait des infos d'urgence, et la russe allait pouvoir l'aider. Elle portait dans une pochette un de ses carnets, l'un des rares qu'elle n'avait pas brûlés, pleins de notes et de mots en vrac.
Elle portait un grand manteau bleu foncé, remonté jusqu'au cou, avec une écharpe gr... entre le noir et blanc. Ses pieds se perdaient dans de grandes bottes qui remontaient jusqu'aux genoux et qui, bien qu'elles lui avaient coûté les yeux de la tête, avaient une putain de classe. Bref, les mains dans les poches, elle ne levait les yeux que pour ne pas se manger les murs. 'fin, ça c'était avant de percuter l'abruti qui ne semblait pas regarder sa route.
D'un coup par terre, elle retint un juron, regarda aux alentours si personne d'autre n'avait prêté attention à la scène. Le couloir restait désert.

- Hurm, pardonnez-moi, je n'ai pas fait attention.

Un grand, les épaules larges, il ressemblait bien au profil type des agents de GML. Elle se releva, puis réajusta son manteau et son écharpe. L'automne se poursuivait et portait encore l'empreinte de l'été, il faisait trop chaud.

Un grand château d'un autre temps au milieu d'une petite ville moderne. Un lieu intemporel, qui convenait parfaitement pour l'occupant des lieux. GML et son regroupement de personnages de contes malveillants. Et aussi étrange que cela puisse paraître, lui, celui qu'on surnommait le Chasseur de Contes, déambulait dans les longs couloirs d'un autre temps sans que personne ne l'arrête, sans que quiconque ne déclenche une alarme,... Il était seul dans le couloir, et le bâtiment était d'un silence morbide. Même le bruit de ses pas sur le couloir était aussitôt étouffé, et on pourrait presque se demander, en dépit du constat logique qui était qu'il pouvait respirer, s'il y avait de l'air dans cet endroit. Sans air, le son ne se déplace pas. Et la chape de plomb qui régnait sur le lieu en faisant autant un endroit calme et agréable au premier abord qu'il ressemblait à une tombe tant le silence était morbide. L'endroit était infecté de la magie rassemblée par tous les personnages de contes qui s'étaient rassemblés dans le lieu. Une telle quantité permettait d'éviter qu'un humain normal ne s'approche de l'endroit, et suffisait pour qu'Alexandar soit excessivement mal à l'aise dans l'endroit.
Bon d'accord, c'était aussi accessoirement la base de l'ennemi. Mais un ennemi, une fois qu'on l'a vu, on peut l'éliminer. Là, il n'y avait que le silence. Et l'incertitude. Nom de D***, où est passé Vassilisa ? Elle devait lui donner des infos et l'avait comme à son habitude (en fait, plus que d'habitude) provoqué jusqu'à lui dire que s'il voulait des informations il n'avait qu'à venir les chercher. Il avait tendance à oublier à quel point elle pouvait être retorse, et il avait la désagréable sensation d'avancer dans un piège.
Il rajusta le long manteau noir qu'il portait sur ses épaules tandis qu'il enfonçait son visage dans l'ombre de sa capuche. Il n'avait pas mis les bras mais ses manches, ce qui lui permet de vérifier son équipement. Trois pistolets, placés sous l'épaule, sur le creux des reins et le long de la cuisse, tous chargés et avec des chargeurs supplémentaires un peu partout. Plus un couteau dans la semelle de sa chaussure, et deux lames le long de ses avant-bras. Il avait oublié de prendre une grenade, dommage.
Il percuta au détour d'un des couloirs de l'édifice une jeune femme vêtue d'un manteau bleu foncé et une écharpe grise qui tomba, lui permettait d'observer qu'elle portait aussi de longues bottes. Donc de deux choses l'une. Ou il n'y avait pas de piège, parce qu'à priori elle ne s'attendait pas à quoi que se soit vu la manière dont elle était tombée, et vu la manière dont elle était habillée elle n'avait pas l'air d'être prête à livrer un quelconque combat. Ou alors, il y avait une faille dans le plan de l'Organisation.

- Hurm, pardonnez-moi, je n'ai pas fait attention.

Et m****, cette voix ! L'agent Blue. Bon, il ne savait pas ce qu'elle venait faire ici, et même s'il aurait certainement aussi payé cette information auprès de Vass, l'objectif actuel était surtout qu'elle ne le reconnaisse pas. Si ça remontait jusqu'à MG, il était fini. Il prit une position hautaine, son visage toujours caché sous sa capuche noire et répondit avant de la dépasser et de continuer son chemin:

-Je le constate. Tâchez d'y remédier.

- Excusez-moi, est-ce que...

Non, je m'en fiche. Je ne veux pas savoir, oublie moi et laisse moi m'en aller avant qu'on se fasse remarquer et qu'on finisse en pièces. Un ou deux adversaires, oui, l'Organisation au complet je préfèrerai éviter, songea Alexandar en s'éloigna à grand pas, avec un bref espoir de s'en sortir aussi simplement.
Elle le rattrapa en quelques bonds et lui barra à nouveau le passage, cette fois intentionnellement. J'ai eu un espoir...En plus elle avait l'air vexée. Cette histoire allait être compliquée, il le sentait.

Elle ne m'a pas encore reconnue, ai-je encore une chance ? soupira in petto Alexandar en s'arrêtant à nouveau tandis que la jeune femme lui dit du bout des lèvres:

- Pardon, mais je cherche quelqu'un, c'est important
Nous cherchons tous des gens, et nous avons tous des choses importantes à faire, rétorqua-t-il d'un ton aussi peu aimable que la première fois en faisant un pas de côté et en la dépassant à nouveau. Peut-être que cette fois serait la bonne. Peut-être.

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